L'héritage de maître Wan Laisheng : tout savoir sur nos styles et ceux qui les ont faits
Présentations des arts martiaux traditionnels chinois, histoire du Style naturel, du Shaolin Liu He Men, de maître Wan Laisheng, de maître Liang Chao Qun, anecdotes, figures légendaires...
Origines des arts martiaux chinois
Les racines des arts martiaux traditionnels chinois plongent fort loin, et sont à l'origine même d'arts martiaux tels que le Karaté (dynastie Ming), le Taekwondo (dynastie Tang) ou la boxe thaïlandaise (dynastie Song).
Très riches, ils sont constitués de plus de 200 différents styles, répartis entre externe (Waijia), interne (Neijia), style du Nord, du Sud ou Style Naturel : tous appartiennent à l'une ou l'autre de ces 5 familles représentatives.
- Le Waijia (Kung Fu externe, surtout Bouddhiste) n'est pas né avec Bodhidharma et le Shaolin (dynastie Liang au 6ème s). Le Kung Fu préexistait à l'arrivée du moine indien en Chine. Pourtant étroitement lié au Bouddhisme, le terme Waijia (externe, sortir) viendrait de ce que les moines bouddhistes quittaient leur famille pour prendre les ordres. Dans le Waijia, on cherche à porter le premier coup pour avoir le dessus.
- Le Neijia (Kung Fu interne, surtout Taoïste), et opposé du Waijia, remonterait à la dynastie Song (vers le 10ème siècle). D'obédience taoïste, il serait influencé par Lao Zi. Dans les préceptes du Neijia, on laisse l'adversaire attaquer en premier pour mieux le maîtriser. Le Neijia se caractérise par la souplesse et la lenteur de ses mouvements, et une pratique avant tout énergétique (exemple : Tai Ji Quan, Xing Yi Quan, Ba Gua Zhang, Zi Ran Men…).
- Bei Pai (Kung Fu du Nord), mis au point par les Chinois septentrionaux, plus grands, et qui privilégie des techniques de combats longues sollicitant tous les membres. Les déplacements sont fluides et rapides (Hong Quan, Cha Quan, Hua Quan…).
- Nan pai (Kung Fu du Sud). Les Chinois du Sud sont plus petits et ne prennent par conséquent pas l'initiative dangereuse d'attaquer. On préfère dans le Sud attendre la première attaque de l'adversaire et contre-attaquer derrière. Le Nan pai privilégie la formation des avant bras, durs comme du métal et voués à briser les membres adverses sur blocage (Wing Chun, Hung Gar, choi Li Fut….).
- Ziran Men (Syle naturel, Taoïste), marie le dur du Waijia, et le souple du Neijia, des techniques longues du Nord, et des techniques rapprochées du Sud, c'est-à-dire que le Style Naturel regroupe l'essence des arts martiaux traditionnels chinois, en cherchant également à nourrir le principes vital, comme tout art martial énergétique.
Les arts martiaux traditionnels chinois sont très complets et adaptés à tous les âges, tous les sexes et toutes les morphologies. La progression y est régulière et codifiée, s'appuyant sur l'évolution harmonieuse et naturelle des individus (commencer par un style de Kung Fu externe comme le Shaolin), puis s'acheminer vers des styles plus internes lorsque les fondamentaux physiques et techniques sont acquis.
Impossibles à maîtriser par définition tant les styles et les pratiques sont multiples, les arts martiaux traditionnels chinois restent largement méconnus, que ce soient les formes, styles, et courants principaux les plus emblématiques ou leurs influences respectives. La maîtrise et l'expertise dans le domaine des arts martiaux passe nécéssairement par la pratique, mais également par des élément culturels, philosophiques et historique de remise en contexte. En effet il est traditionnellement considéré que le simple aspect technique ne se suffit pas à lui-même et qu'il doit s'accompagner d'une notable culture générale appuyée par des expériences pratiques (confrontation, enseignement, mises à l'épreuve en tout genre...) et académiques (rédaction d'articles et d'ouvrages, conférences, rencontres et débats...).
L'essence du Style naturel
动 静 无 始
变 化 无 短
虚 虚 实 实
自 然 而 然
Dong Jing Wu Shi
Bian Hua Wu Duan
Xu Xu Shi Shi
Zi Ran Er Ran
Kung Fu ou Wushu ?
Nous avons une mauvaise connaissance des arts
martiaux chinois en France. Cela provient à la fois d’un manque
d’information, d’un manque d’enseignants de niveau correct, mais aussi
une confusion entre les termes "Kung-Fu" (Gong Fu ) et "Wushu". Cette
confusion est parfois savamment entretenue par les professeurs ( par
action ou par omission, y compris par les enseignants chinois en
occident).
D’une façon générale, en France, on considère que le Kung-Fu désigne les arts martiaux chinois traditionnels, et que le terme wushu désigne les arts martiaux chinois modernes. Dans la pratique c’est exactement l’inverse.
Le
terme Kung-Fu a été introduit en France par les Jésuites qui ont ramené
de Chine des éléments de Qigong Taoïste, en parlant de « Kung-Fu ».
Mais ce qui a réellement popularisé le terme Kung-Fu en France et en
Europe, ce sont les films de Bruce Lee, qui ont créé un choc dans le
monde des pratiquants, ainsi qu’en nous faisant découvrir les films de
« Kung-Fu ».
En Chine, le terme Kung-Fu s’adresse à tous les
domaines, au sein desquels on a besoin de travailler, de se
perfectionner ( ce peut être la calligraphie, la cuisine…).
Le terme Kung-Fu s’explique par la phrase :
(Gongli, Suyang, Benyi ) qui signifie :
"Affûter
ses outils (ce qui nécessite du temps de travail ), développer des
qualités acquises par des exercices coutumiers (ce qui implique une
régularité ), poursuivre son objectif original (ce qui implique une
volonté ) " .
Le Kung-Fu représente donc n’importe quelle activité
ou pratique, qui demande, du temps, du travail, de la régularité, des
efforts, de la persévérance et de la perfection.
Le
terme exact pour l’art martial est Wushu. Il provient d’une citation
faite par le fils d’un roi chinois, Xiao Tong , qui vécut de 501 à 531
et qui dit :
(Youbi Wushu, Chanyang Wenling)
Arrêter la guerre et commencer à cultiver (dans tous les sens du terme) le pays.
De cette formule est né le terme Wushu. On constate alors que même si le terme Wushu désigne littéralement "les techniques pour faire la guerre" , sa première apparition historique figure dans une maxime qui valorise la paix!
En 1926, il y eu création du Zhong Guo Wu Shu a Nanjing, qui donnera plus tard le Guo Shu (c’est à dire le Wushu, mais en soulignant sa spécificité nationale). A partir de là, et notamment ensuite à Taiwan, le Wushu fut souvent appelé Guoshu).
Il est à noter que les éléments de l’identité nationale Chinoise (toujours d’actualité) sont au nombre de trois :
- le Guoshu (l’art martial )
- la Médecine chinoise Traditionnelle
- la langue chinoise
On constate ainsi que la terminologie traditionnelle et ancienne pour l’art martial est le mot Wushu, tandis que l’appellation Kung-Fu est une déformation récente d’une expression chinoise et ne désigne pas forcément l’art martial.
Le Wushu au sens moderne du terme a vu le jour en Chine en 1959, soit dix ans après la révolution populaire. Il n’a été enseigné à l’université et diffusé dans les livres qu’à partir de 1961. Dès lors, le gouvernement chinois a valorisé le Wushu moderne au détriment de l’art martial traditionnel, et ce, pour des raisons politiques et idéologiques (peur du taoïsme, du bouddhisme, des pratiques martiales, des traditions…mais aussi parce qu’il est plus facile de contrôler des enseignants universitaires que des personnages marginaux de filiation traditionnelle !).
Le Kung Fu traditionnel comprend quatre composantes, quatre vastes domaines d’étude qui sont :
- Les techniques Pieds/Poings : frappe, balayage, saisie, clés, protection…
- Les techniques d’Armes : 18 armes classiques…
- Les techniques de lancer : dards, baguettes, étoiles, clou, griffe…
-
Les techniques de Jibengong : travail des bases, des positions, des
renforcements, de la musculation, des techniques de base, des
déplacements, certains Qigong…
Le
niveau des pratiquants français d’art martiaux est médiocre au regard
du niveau chinois bien entendu, mais également vis-à-vis des autres
pays européens. Il n’existe pas non plus d’enseignement de valeur en
Kung-Fu interne dans notre, ce qui favorise l’épanouissement des
«mystères, secrets ou autres syncrétisme et pseudo-maître ». Un des
préalables pour améliorer la pratique, devrait consister par adopter
les termes justes, le vocabulaire approprié… et donc parler de Wushu
(pour les arts martiaux traditionnels) ou de Kung-Fu moderne.
Enfin,
on peut noter que dans la langue chinoise l’expression « Kung-Fu Wushu
», n’est jamais utilisé mais que l’on parle soit de Kung-Fu, soit de
Wushu, sans associer les deux.
Shaolin, vous avez dit Shaolin ?
Cela faisait de nombreux mois que le vieil homme suivait la
piste qui conduisait du « Berceau de la civilisation » (L’Inde ), à la contrée
Barbare qu’était la Chine. Avec ses soixante ans, c’était un exploit qu’il put
franchir les massifs de l’Himalaya, traverser le plateau Tibétain et la Chine
intérieur, pour arriver à Chin Ling, capitale de la dynastie Liang. Mais notre
homme, que l’on appelait DAMO (ou Ta Mo ou Pu Ti Ta Mo ou Pu Tu Duo Luo ou
encore Daruma Taishi en japonais), n’étais pas n’importe qui. Moine Indien,
troisième fils du Grand roi Sugandha de la province de Madras, membre de la
caste des Guerriers, c’était un solide Prajnatara, un maître du Mahayana
(courant bouddhique du grand véhicule. Il veut amener le plus grand nombre à
l’illumination) et 28° patriarche après le Bouddha.
Au fur et à mesure qu'il pénétrait en Chine, il put voir la
forte influence que le Bouddhisme exerçait sur le pays. Mais la préférence des
rites, à la réelle compréhension du message Bouddhique l’irrita, et ce fut d’un
air sévère qu’il arriva à la cour de l’empereur Wu. Son renom de Prince, le
précédant, il fut reçu facilement par l’empereur, mais l’entrevue se révéla
orageuse. Da Mo critiqua violemment tout ce qu’il avait pu observer et dénonça
ce qu’il considérait comme des actes de « bonne conscience ». L’empereur
rétorqua :
-« J’ai diffusé les textes sacrés, crée des temples,
multiplié les moines, protégé la loi…. Ces actes ne méritent-ils pas quelques
considérations ? »
-« Rien de cela n’est méritoire ! » répondit Da Mo
-« Dis-moi alors, où se trouve la voie ? » interrogea
l’empereur.
-« La voie habite toute chose, rien n’est sacré ! » affirma
Da Mo.
-« Qui es-tu donc alors ? » demanda l’empereur en perdant
patience
-« Je n’en sais rien moi-même… » termina notre émissaire.
Il n’eut la vie sauve, que grâce au prestige qui entourait
son rang de Prince et de Prêtre. Connaissant la susceptibilité des empereurs
chinois, le fait qu’il put partir sain et sauf de la ville, tient du miracle.
Ainsi désavoué, Damo partit vers le Sud.
Il arriva un matin sur la rive du Changjiang
(Yang-Tsé-Kiang) en crue. Pour traverser le fleuve immensément large, il coupa
un roseau à cinq feuille et en marchant sur la branche, il réussit à franchir
le puissant cours d’eau. Il faut savoir qu’à cette époque, en période de crue,
même avec un bateau, il était dangereux de traverser le fleuve. De ce miracle
les descendants de Da Mo, retinrent le nombre 5 comme symbole de son
enseignement.
Finalement, notre voyageur demanda asile aux Daoshi (moines)
du monastère de Shaolin. Mais très vite, il se heurta à leur conception du
Hinayana. Il se retira alors à l’extérieur du monastère, à un kilomètre au
Nord, près du sommet des « 5 mamelons » au fond d’une petite grotte. Il s’assit
face à la paroi, et entra dans un méditation profonde qui allait durer 9 ans,
sans manger, boire ni dormir. Il perdit complètement l’usage de ses mains et de
ses pieds.
Un jour, il eut un instant de faiblesse et s’endormit…. Il
se réveilla furieux, et pour éviter que l’incident ne se reproduise, il se
coupa les paupière et les jeta à terre. Ces paupières donnèrent naissance au
premiers arbres à Thé.
Dans sa méditation, in entra en communication avec le monde
qui l'entourait : il comprenait et dialoguait avec les arbres et les insectes,
les rochers... Le viel ermite avait éveillé la curiosité et l'admiration des
moines du temple. L'un d'entre eux, Hui He, se présenta à lui et demeura une
semaine entière immobile dans la neige à l’entrée de la grotte. Le vieillard ne
semblait pas le voir. Hui He supplia le maître de tenir compte de sa présence ;
et enfin, un matin : « Je ne bougerai pas tant que la neige ne sera rouge ! »
déclara Da Mo, qui voulait ainsi être tranquille. Mais Hui He le prit au mot,
se coupa le bras gauche, inonda la neige de son sang, et porta son bras au
maître. Emu, celui-ci se retourna et écouta.
-« Maître, mon esprit est agité, puis-je te prier de lui
apporter la paix ? » interrogea Hui He.
-« Montre cet esprit tant perturbé, fais le sortir et je lui
donnerai la paix ! »
-« Mais seigneur, il m’est impossible de te montrer mon
esprit… »
-« Tu vois bien, je t’ai déjà apaisé » finit Da Mo, avant de
retourner a sa méditation.
Par la suite, il donna son bol et son bâton a Hui He, et en
fit son successeur.
Da Mo atteint le Nirvana (l’illumination), et sorti finalement
de sa longue méditation. Il redonna vie progressivement à son corps mortifié
par les année, grâce à des exercices qu’il découvrit au cours de ses
méditations.
Il rentra au monastère, mais fut reçu cette fois comme saint
Bodhidharma (l’illuminé ), comme l’appelait maintenant les moines. Il s’aperçut
que la plupart d’entre eux, étaient malades, fragiles, à cause de leur vie
monastique. Aussi, Il leur enseigna sa philosophie (qui allait s’appeler le
Chan – Zen en japonais ) et des techniques pour redonner vie à leur corps : les
Art Martiaux de Shaolin étaient nés. En effet, tous les mouvements qu’il
enseigna, étaient des techniques martiales dont le but était l’efficacité en
combat et le renforcement du corps.
D’après la légende, Bodhidharma mourut à Shaolin, et une
tombe accueillit sa dépouille. Mais quelques mois plus tard, un officier de
l’empereur crut voir le saint homme dans le Turkestan. Il portait son bâton et
une sandale aux pied. L’empereur fit ouvrir la tombe de Bodhidharma où l’on ne
retrouva que la deuxième sandale.
Bodhidharma traversa la Chine comme un mirage, mais son
héritage est bien réel. Les Arts Martiaux de Shaolin venaient d’entrer dans
l’histoire…
L’art Martial de Shaolin devait initialement faire
travailler les moines qui restaient longtemps en méditation. Le principe était
d’activer la circulation du Qi et du sang par des séries de mouvements. Cette
gymnastique a évolué pour aboutir à ce que l’on connaît comme l’art martial de
Shaolin. On considère trop souvent à tort le Shaolin Quan comme un art externe
exclusivement, alors que le style Shaolin peut être divisé en deux branches,
inspirées de deux ouvrages attribués à Da Mo : l’un sur l’interne et l’autre
sur l’externe :
- une branche interne ou Neigong (ou Neijia : travail
interne ) de Shaolin qui était réservée à quelques moines du temples triés sur
le volet parmi ceux qui s’étaient engagés dans l’ordre et passaient leur
existence au monastère. Cette branche interne a quasiment disparu et n’est plus
représentative des art martiaux de Shaolin aujourd’hui.
- une branche externe ou Waigong (ou Waijia : travail
externe ) de Shaolin qui représentait l’enseignement destiné aux moines qui
devaient un jours repartir chez eux, ou quitter le monastère. Il est à noter
que l’art martial Shaolin est aussi qualifié d’art externe, car contrairement
aux arts martiaux familiaux, qui étaient les plus nombreux et se pratiquaient
dans la maison familiale, pour pratiquer le Shaolin Quan, il fallait
s’expatrier, pour aller étudier au temple (donc « à l’extérieur » de chez soi !
).
En effet, à cette époque, il était relativement aisé et
courant de devenir moine, ainsi que de quitter un temple pour revenir à sa vie
profane. En fait, peu de membre étaient réellement et profondément impliqués
dans sa vie spirituelle du temple.
Cette différence d’enseignement, au sein même du temple est
à l’origine de beaucoup d’erreur d’interprétation et de transmission par la
suite. Le style de Shaolin est très répandu, car il était enseigné à ceux qui
le désiraient (ou presque ), alors que l’art interne est peu répandu car chaque
maître n’enseignait qu’à quelques élèves cooptés et ayant fait leurs preuves.
Classiquement on distingue dans le style de Shaolin :
Les trois grandes familles de Shaolin (San Da Jia ) :
- le Hong Jia: style dur, pur, que l’ont pourrait comparer
au karaté Shotokan
- le Kong Jia: style souple et doux
- le Yu Jia: style à la fois, dur, souple et doux (c’est le
cas par exemple du Luohan Quan )
Les quatre grandes écoles de Shaolin (Si Da Men ) :
- le Da Cheng Men
- le Luo Han Men
- le Er Lan Men
- le Wai Tou Men (auquel fait partie le Liu He Men)
Les animaux de Shaolin :
- le Dragon (Long )
- le Léopard ( Bao )
- le Serpent (She )
- Le Tigre ( Hu )
- La Grue (He )
Le Shaolin Quan ( dans son aspect externe ) ne doit plus
être pratiqué avec la même intensité à partir d’un certain âge car quand le
corps vieillissant, il faut davantage orienter sa pratique vers l’interne (Tai
Ji Quan, Ba Gua Zhang, Xin Yi Quan, Zi Ran Men …) et la santé, sous peine de
voir apparaître des problème médicaux.
Il existe bien certains enseignants ou maîtres en Chine qui
continuent à pratiquer au delà de 40 ans, mais ils meurent relativement tôt.
Quand on s’est entraîné pendant dix ans, jusqu’à plusieurs heures par jour, il
faut être capable de modérer sa pratique et de trouver une activité juste, pour
conserver la vitalité et entretenir la chaleur interne développée par
l’entraînement antérieur. Si l’on continue à s’entraîner comme avant on s’expose
au risque de faire monter la température et s’épuiser (c’est ce qu’on appelle
entre autre le syndrome du « Feu du Dragon »). En effet, « Si l’on affûte trop
longtemps son épée, non seulement elle ne coupe plus mais la lame a disparu ».
En Chine, la progression traditionnelle passe par la
pratique d’un style externe les trois premières années. Pendant les trois
années où l’on ne pratique que l’externe, il convient de ne pratiquer qu’un
seul style afin de réellement le maîtriser. Il devient alors beaucoup plus
facile de s’orienter vers d’autres style (externe ou interne ), en s’appuyant
sur des bases solides.
Avec le temps, Shaolin est devenu célèbre pour son art du
bâton ( alors que le mont Wudang l’était pour l’épée ). Voici comment la
légende attribue à Jin Na Luo l’introduction du bâton au temple.
Un jour de la fin du VI° siècle, le temple est attaqué par
un troupe de brigands. Les moines essaient de résister, mais rapidement, ils
sont rapidement submergés et c’est la « débandade » ! Intervient alors un moine
mendiant qui était hébergé depuis quelque jours dans l’enceinte du monastère.
Armé de son seul bâton, il se lança dans la mêlée. Avec virtuosité et célérité,
il mit hors de combat tous les bandits à sa portée. Il frappait de droite et de
gauche… toujours avec une égale vitesse et une redoutable précision. Surpris
d’une telle résistance, la troupe d’assaillant fait volte-face et se replie en
ordre dispersé. Après cette victoire inattendue, les moines tombent à genoux
devant leur sauveur, pour le remercier et le supplient de rester pour leur
enseigner le maniement du bâton. Le mendiant connu sous le nom de Jin Na Luo,
accepta et transmis son savoir … de même qu’il nettoyait le four (car telle
était sa charge communautaire) … avec son bâton!
Il est à noter qu’il existe également des armes propres à Shaolin comme la canne de Damo, les crochets, la pelle du moine…
Biographie de Wan Laisheng : l'homme aux 7 maîtres
Wan
Laisheng, « l’homme aux sept maîtres », a pu bénéficier contrairement à
ce que pourrait laisser supposer son surnom de l’enseignement de huit
de ces experts exceptionnels, connus ou anonymes, qui ont été amenés à
jouer un très grand rôle dans son développement personnel, et
contribués à développer ce style aujourd’hui enseigné à Paris et en
Chine par maître Liang Chao Qun.
Né le 21 février 1903 à Wushang dans la province du Hunan au sein d’une famille de lettrés, Wan Laisheng suivit ses études à l’Université d’agriculture de Pékin. Il étudia en parallèle le Kung Fu avec enthousiasme sous la direction de Zhao Xin Zhou, un maître de la boxe Shaolin du nord qui lui enseigna le style Liu He Men, ou boxe des six coordinations.
Il completa son enseignement auprès de Liu Bai Chuan qui l’initia à la boxe Luo Han, ou boxe des arrhats, forme qui appartient également à la famille Shaolin du nord.
Parmi tous les maîtres qui participèrent à sa formation, ce fut pourtant Du Xinwu qui l’influença le plus. Dit « jambe divine », ce dernier avait reçu l’enseignement en Style Naturel du fondateur Xu Ai Zhi lui-même. Wan Laisheng devint à son tour l’expert de la troisième génération de cette école de Kung Fu taoïste dit interne.
Il écrivit plus tard à 25 ans la première synthèse moderne sur les arts martiaux chinois, intitulée « La somme du Wushu » et qui présente la quintessence des enseignements qui lui avaient été prodigués. Il écrivit par la suite des ouvrages tout au long de sa vie, portant bien entendu sur le Wushu, mais également sur la philosophie, la médecine ou le taoïsme. Certains font encore référence de nos jours. Victime de la répression politique de la révolution culturelle, Wan Laisheng fut incarcéré pendant deux années dans un camp de rééducation où il put survivre grâce aux techniques de Qi Gong qui lui permirent de conserver sa vigueur physique lorsque d’autres perdaient la raison ou mourraient de mauvais traitements.
Maître Wan Laisheng s’éteignit en 1992 dans la ville de Fuzhou. Peu avant sa mort il désigna comme le veut la tradition son successeur qu’il reconnut dans son disciple le plus jeune : Liang Chao Qun.